Étienne MARTIN : en vertu des grands principes
Le Parc des eaux vives, le Biotech… Le maire aura laissé son empreinte dans la ville et son caractère marqué les esprits. « J’aurais pu être plus souple parfois. Mais pas sur les principes ! »
Sa coupe à la brosse qui ne souffre pas la moindre mèche vagabonde laisse supposer, sinon un ancien baroudeur parachuté du Viêt Nam, pour le moins un homme carré sur les principes et droit dans ces bottes-là. On sent bien les sujets qui fâchent. On serait même tenté de le chatouiller histoire de voir s’il est bien toujours Étienne MARTIN.
Mais mollo quand même sur les traits d’esprit quand il vous parle de sa fidélité à l’ancienne démocratie chrétienne et vous évoque sa famille, les Marcel Rudloff, Pierre Schielé et autre Charles Stoeffel… « Une fidélité qui impose des règles comme le respect des autres, l’honnêteté, la rigueur dans la vie politique comme dans la vie tout court… »
À écouter le maire honoraire Étienne Martin, revient la réplique de Cyrano qui ne « sortirait pas avec, par négligence, un affront pas très bien lavé, un honneur chiffonné… » pour déclamer : « moi c’est moralement que j’ai mes élégances ».
Mais Cyrano avait des colères aussi.
Et René Moebel, qui « pratiqua » son ami Étienne pendant près d’un quart de siècle à la mairie, dévoilait à son départ en 1995 « qu’il y eut parfois des coups de gueule au cours des réunions de la municipalité ».
On dit même qu’à ces fameuses réunions, l’ami Étienne savait manœuvrer pour conclure sur son seul point de vue. 19h30, c’était – immuable – l’heure de sa fringale qui lui imposait de rentrer et de clore le débat. « Je leur ai fait croire cela. Et ils l’ont cru » (ou fait semblant).
« J’ai pu être cassant. C’est un de mes défauts. Même dans le privé. Et j’ai demandé pardon à ceux que j’ai blessés. J’aurais pu être plus souple parfois. Question caractère. Mais pas sur les principes ! » Oui ! C’est bien toujours l’Étienne Martin qu’on a connu.
« On peut se rater »
Reste qu’être maire, c’est aussi devoir trancher et se retrouver seul, parfois. Quand il a été élu maire en 1987, l’homme avait déjà de la bouteille pour animer le conseil depuis 1965 et la municipalité depuis 1971. On peut comprendre une certaine… assurance même s’il reconnaît que le métier n’est pas sans risque. « On peut se rater ».
Il n’aura en tout cas pas raté son « bébé », le Parc des eaux vives qu’il aura eu le courage de lancer à l’époque. Des visites de ce type d’équipements dans la vallée du Rhône l’ont carrément « emballé » dit-il. « J’étais convaincu. C’est ce qu’il nous fallait pour revaloriser notre ville. Et toute l’équipe s’est mouillée ».
Avec, pour l’époque, une facture de 21 millions de francs (depuis, avec la Timonerie et le Comptoir notamment, l’ardoise a pratiquement doublé), le PEV reste la réalisation phare d’Étienne Martin. Et pour le moins, un canoë-kayak devrait porter son nom.
Tout comme un labo du Biotech pour lequel il s’est aussi beaucoup mouillé. « La biotechnologie faisait peur. Le centre devait se faire à Bâle mais sa population n’en voulait pas. Toute innovation crée des inquiétudes. J’ai fait des démarches pour que cela se réalise ici : j’ai vu M. Krauer, le patron de Ciba Geigy, qui redoutait les arcanes de l’administration française, je suis allé voir le préfet Hélène Blanc, j’ai arrangé un rendez-vous entre eux auquel j’ai été associé… »
« Théo, sur des béquilles… »
De son passage à la mairie, Étienne Martin retient cette formidable possibilité « de créer, de façonner une ville. » Des joies, des émotions aussi. « Théo (N.D.L.R. Bachmann, le maire de Saint-Louis) malade, venu sur ses béquilles, pour moi, me féliciter pour mon élection ».
Et s’il ne regrette pas son retrait pour raison de santé – « j’ai le bonheur aujourd’hui de la vie de famille » – les affaires municipales ne le laissent pas indifférent.
Ainsi l’échec de Plasco. « René (Moebel) a bien fait de l’acheter. Et j’ai été choqué par le veto de Jean Ueberschlag. Je ne lui pardonnerai jamais. Et je lui ai dit. »
Pour le reste… On dit qu’au pied de la Passerelle, existe un arbre des palabres où quelques anciens referaient la ville.
Mais qu’ils ne comptent pas sur Étienne pour élargir le cercle.
« Je n’émets aucun avis. Je fais confiance à l’équipe municipale en place. C’est une bonne équipe. »
Jean-Louis Mossière